Nous clôturons notre série de publications spéciales Octobre Rose avec l’interview de la Docteure Vanessa Aflalo – Hazan. Cette radiologue spécialisée en sénologie exerce à l’IMPF et fait partie du réseau IMDEV depuis 10 ans.
Comment êtes-vous devenue spécialiste en sénologie ?
Au cours de mon internat à l’Assistance Publique – Hôpitaux de Paris, j’ai eu l’opportunité d’effectuer deux stages en sénologie au sein de services hospitaliers de référence. Ces expériences particulièrement enrichissantes ont confirmé mon attrait pour cette discipline et m’ont naturellement orientée vers cette spécialité. La relation privilégiée avec les patientes qu’offre cette discipline a aussi nettement influencé mon choix.
« La relation privilégiée avec les patientes qu’offre cette discipline a […] nettement influencé mon choix. »
Par la suite, j’ai exercé les fonctions de cheffe de clinique pendant quatre années puis praticien hospitalier à l’hôpital Avicenne, où je supervisais deux pôles : l’imagerie digestive et l’imagerie mammaire. C’est dans ce cadre que j’ai rencontré le Docteur TAYEBJEE ONE ALY, radiologue spécialisé en sénologie au sein du réseau IMDEV, qui assurait une vacation hebdomadaire à l’hôpital. Notre collaboration s’est immédiatement révélée fructueuse : j’ai commencé à l’assister lors de ses vacations à l’Hôpital privé de la Seine-Saint-Denis, approfondissant ainsi ma formation pratique en sénologie à ses côtés.
Quelques années plus tard, en 2015, j’ai rejoint le réseau IMDEV en tant que radiologue associée au sein de l’IMPF, où je travaille depuis en binôme avec le Docteur Tayebjee.
Quels examens de sénologie pratiquez-vous et comment se divise le travail en binôme ?
Nous réalisons l’ensemble des examens d’imagerie mammaire : mammographies de dépistage et de suivi post-opératoire, échographies mammaires, microbiopsies et macrobiopsies guidées par échographie ou stéréotaxie, ainsi que des IRM mammaires. Par ailleurs, nous assurons les poses de clips et de harpons en vue de chimiothérapie néoadjuvante et de tumorectomie.
« Nous participons activement aux RCP en cancérologie, afin de définir, avec nos confrères, la stratégie thérapeutique la plus adaptée à chaque patiente. »
Nous participons activement aux Réunions de Concertation Pluridisciplinaire (RCP) en cancérologie, afin de définir, avec nos confrères, la stratégie thérapeutique la plus adaptée à chaque patiente.
Concernant notre organisation en binôme, nous alternons régulièrement nos rôles : tandis que l’un réalise les gestes techniques, l’autre se consacre à l’interprétation diagnostique. Cette complémentarité nous permet de conserver une vision globale des dossiers, d’enrichir nos échanges sur les cas complexes et d’assurer une continuité optimale des soins, même en cas d’absence de l’un de nous.
Comment avez-vous structuré le parcours de soins des patientes ?
Nous avons souhaité mettre en place un véritable parcours de soins intégré, dédié au dépistage et à la prise en charge des cancers du sein. Ce projet, fruit d’une collaboration entre plusieurs centres et spécialités, constitue une grande fierté pour notre équipe.
Les cabinets du réseau IMPF nous adressent les patientes nécessitant une biopsie après une mammographie suspecte. Cela nous permet de centraliser les cas issus de la majorité de nos centres d’imagerie de la Seine-Saint-Denis. Une fois intégrées dans le parcours, les patientes bénéficient d’un accompagnement complet : nos plateaux techniques de dernière génération permettent de réaliser l’ensemble des examens nécessaires, tandis que nous collaborons étroitement avec d’autres spécialités médicales et chirurgicales pour une prise en charge rapide et adaptée.
« Nous collaborons étroitement avec d’autres spécialités médicales et chirurgicales pour une prise en charge rapide et adaptée. »
Notre secrétaire médicale, Nadia MMADI, formée à la fois comme aide-soignante et en relaxo-thérapie, joue un rôle essentiel dans cette prise en charge. Elle assure la coordination des rendez-vous, accueille les patientes et les accompagne durant les examens, contribuant à humaniser le geste et à apaiser les appréhensions.
Une fois les résultats disponibles, les patientes sont systématiquement revues en consultation par mon confrère ou moi-même dans un délai d’une semaine et orientées vers le spécialiste adéquat, si nécessaire, en fonction de leur lieu de domicile et de leur souhait, et si elles n’ont pas déjà un médecin référent.
« Ce circuit intégré évite toute perte de temps et garantit une prise en charge experte et bienveillante dès l’annonce du diagnostic. »
En cas de diagnostic de cancer, elles bénéficient d’un suivi rapide assuré par une équipe pluridisciplinaire de chirurgiens gynécologues, cancérologues, radiothérapeutes et radiologues spécialisés. Ce circuit intégré évite toute perte de temps et garantit une prise en charge experte et bienveillante dès l’annonce du diagnostic.
Quelles actions menez-vous à l’occasion d’Octobre Rose ?
La campagne Octobre Rose revêt une importance particulière pour notre département, tant le dépistage constitue un enjeu de santé publique majeur, notamment en Seine-Saint-Denis.
Chaque année, nous réservons des créneaux dédiés afin de proposer une mammographie de dépistage aux patientes venues pour un autre examen, lorsqu’elles ne l’ont pas réalisée depuis plus de deux ans. Cette initiative permet de lever certaines appréhensions et d’encourager un dépistage spontané.
Nous organisons également des sessions de formation continue (EPU) à destination des radiologues, manipulateurs et médecins généralistes, afin d’actualiser leurs connaissances en imagerie mammaire.
Plus récemment, nous avons diffusé sur les réseaux sociaux des vidéos pédagogiques sur l’autopalpation et le dépistage, afin de sensibiliser le public de manière claire et accessible.
Cette année, nous avons lancé un challenge solidaire avec l’Institut Raphaël, structure d’accompagnement post-cancer. Grâce à l’application Kiplin, l’ensemble de nos collaborateurs ont été invités à marcher : chaque pas a généré un don destiné à l’Institut. L’initiative a rencontré un immense succès, avec près de 8 millions de pas cumulés en quelques semaines !
Quelle place occupe l’intelligence artificielle dans votre pratique ?
L’intelligence artificielle (IA) fait désormais partie intégrante de notre activité quotidienne. Le réseau IMPF a été pionnier dans son intégration au sein du parcours de soins, en collaborant notamment étroitement avec la société Therapixel dans le déploiement du logiciel Mammoscreen.
L’IA intervient principalement en seconde lecture des mammographies, offrant une aide précieuse à la détection de lésions subtiles et renforçant la fiabilité diagnostique. Elle permet clairement d’avoir un « second lecteur » en permanence à nos côtés lors de nos vacations de mammographie, renforçant ainsi notre vigilance.
« Les progrès constants des algorithmes laissent entrevoir un avenir prometteur, notamment en matière de prévention personnalisée. »
Les progrès constants des algorithmes laissent entrevoir un avenir prometteur, notamment en matière de prévention personnalisée : certains logiciels permettent déjà d’évaluer, à partir de la densité mammaire, le risque de développer un cancer du sein dans les cinq années à venir.
Comment améliorer le dépistage du cancer du sein ?
Il faut absolument identifier les facteurs de risque les plus influents dans le développement du cancer du sein pour les L’enjeu majeur réside dans la stratification des risques. Le dépistage organisé actuel repose uniquement sur l’âge et le sexe, critères essentiels mais insuffisants. Il convient d’intégrer d’autres facteurs de risque, tels que la densité mammaire, les caractéristiques morphologiques, les antécédents familiaux ou certaines prédispositions génétiques. Des études récentes explorent d’ailleurs la possibilité de prédire le risque de cancer à l’aide de tests salivaires génétiques.
« L’enjeu majeur réside dans la stratification des risques. Le dépistage organisé actuel repose uniquement sur l’âge et le sexe, critères essentiels mais insuffisants. »
Il serait également pertinent d’adapter le parcours de dépistage selon les profils : certaines études ont été réalisées afin de déterminer l’intérêt potentiel à effectuer une IRM mammaire de dépistage chez les patientes avec des seins denses. Les recommandations actuelles en matière de dépistage évolueront très probablement dans un futur proche.
« L’objectif ultime est de construire un dépistage personnalisé, prédictif et préventif. »
Enfin, l’IA pourrait contribuer à réduire le nombre de cancers d’intervalle, en permettant une évaluation personnalisée du risque, en identifiant les patientes à risque élevé et en recommandant des examens plus rapprochés, en détectant les images subtiles, en améliorant la qualité de nos images mammographiques. L’objectif ultime est de construire un dépistage personnalisé, prédictif et préventif.
Quel message souhaitez-vous transmettre à l’occasion d’Octobre Rose ?
N’ayez pas peur du dépistage. La mammographie est un examen rapide, faiblement inconfortable, et réalisé dans des conditions bienveillantes. Ne laissez pas la crainte du diagnostic retarder la consultation : détecté précocement, le cancer du sein se guérit dans neuf cas sur dix.
« Vous êtes les premières à pouvoir remarquer une anomalie : la connaissance de soi demeure le premier acte de prévention. »
Enfin, familiarisez-vous avec votre propre corps grâce à l’autopalpation mensuelle, effectuée toujours à la même période du cycle. Vous êtes les premières à pouvoir remarquer une anomalie : la connaissance de soi demeure le premier acte de prévention.
– Interview de la Docteure Vanessa Aflalo-Hazan, Radiologue spécialisée en sénologie de l’IMPF.
Ne manquez pas l’interview de la Docteure Elisabeth Meyblum, réalisée pour lancer le mois d’Octobre Rose 2025.
