Dans le cadre du mois d’Octobre Rose, nous avons interviewé la Docteur Elisabeth Meyblum, radiologue spécialisée en sénologie au sein du Centre d’Imagerie Médicale de Châteaudun. Découvrez son parcours, sa vision et les actions qu’elle met en place pour améliorer la prise en charge des patientes concernées par le cancer du sein.
Quand vous êtes-vous spécialisée en sénologie ?
Très tôt dans mon parcours, j’ai su que je voulais me spécialiser en sénologie : pendant mes études à l’Hôpital de Paul-Brousse AP-HP, le sujet me passionnait déjà beaucoup.
Lorsque j’ai ouvert le Centre d’Imagerie Médicale de Châteaudun en 1988, je réalisais tous les examens de radiologie conventionnelle. Mais dès que l’activité s’est développée et que nous avons intégré d’autres associés, je me suis pleinement consacrée à la mammographie. J’ai rapidement investi dans du matériel de pointe pour renforcer la qualité de mes consultations et je me suis spécialisée en sénologie. Aujourd’hui, je fais partie des référents dans la région, et notre cabinet accueille de nombreuses patientes au quotidien !
Quels examens pratiquez-vous en tant que radiologue experte en sénologie ?
Notre centre couvre tous les examens nécessaires au dépistage et au diagnostic du cancer du sein. Je réalise moi-même des échographies, des mammographies, des microbiopsies et des macrobiopsies. J’effectue également deux jours de vacations par mois à l’Hôpital Privé d’Eure-et-Loir pour pratiquer des IRM mammaires. L’objectif est d’accompagner les patientes en leur proposant un parcours de soin complet et personnalisé.
« Le bon suivi de nos patientes ne se limite pas aux examens que j’effectue ! J’attache une grande importance au fait d’aider les patientes à appréhender au mieux leur situation. »
Le bon suivi de nos patientes ne se limite pas aux examens que j’effectue ! J’attache une grande importance au fait d’aider les patientes à appréhender au mieux leur situation, quelle qu’elle soit. Nous avons par exemple une secrétaire qui prend le temps d’appeler toutes nos patientes après une biopsie, pour être sûre que tout se passe bien. Il arrive que cet examen provoque des saignements, c’est pourquoi les patientes sont toujours rassurées et ravies d’être recontactées. Pour celles qui devront recourir à la chimiothérapie, nous les aiguillions même pour se procurer une perruque si nécessaire. L’idée est vraiment de les accompagner de A à Z.
Quelles actions mettez-vous en place au sein de votre cabinet pour sensibiliser au cancer du sein ?
Notre cabinet fait de la prévention en permanence ! Lorsqu’elles sont éligibles, aucune de nos patientes ne repart sans avoir fait de dépistage, même lorsque ce n’est pas la raison initiale de leur visite.
« Lorsqu’elles sont éligibles, aucune de nos patientes ne repart sans avoir fait de dépistage, même lorsque ce n’est pas la raison initiale de leur visite. »
De plus, nous avons une salle d’attente dédiée uniquement aux patientes qui viennent faire une mammographie. Cet espace privé leur permet de discuter entre elles de ces sujets, cela crée un climat rassurant et des échanges extraordinaires !
En tant que centre référent en sénologie, nous décorons nos locaux de rubans et de parapluies roses tout au long de l’année. Mais pour Octobre Rose, nous ne manquons jamais de donner encore plus de visibilité à cette cause en accentuant la décoration du centre. Nous distribuons également des pins pour véhiculer le message au maximum en dehors de nos murs.
Avez-vous mené des actions dans le cadre d’Octobre Rose et du dépistage du cancer du sein ?
Avant la mise en place d’une gestion à l’échelle régionale, chaque département organisait localement le dépistage du cancer du sein grâce à une structure dédiée. J’ai dirigé celle de l’Eure-et-Loir pendant 15 ans, d’abord comme Vice-Présidente, puis comme Présidente.
Le dépistage s’organise en plusieurs étapes. La Sécurité sociale envoie des invitations à toutes les femmes concernées, c’est-à-dire à toutes celles qui ont entre 50 et 74 ans. Les patientes effectuent une mammographie qui, après avoir été examinée une première fois par le cabinet qui a réalisé l’examen, est envoyée au centre de gestion départemental (aujourd’hui régional). Ensuite, de manière anonyme, des radiologues effectuent une seconde lecture afin de s’assurer qu’aucune anomalie n’a été oubliée. J’ai réalisé de nombreuses relectures d’examens en tant qu’experte en sénologie au fil des années. C’est un exercice que je continue de faire encore aujourd’hui !

En parallèle des invitations au dépistage, nous mettions un certain nombre d’actions en place afin de sensibiliser la population durant le mois d’octobre. Nous avons organisé de nombreuses animations tous les ans : des stands de dépistage, des conférences, des débats, des distributions de flyers et de goodies… Nous avons également conçu et lancé des initiatives originales, qui ont rencontré un excellent accueil. Par exemple, nous avons présenté une pièce de théâtre jouée par des femmes touchées de près ou de loin par le cancer du sein. Toutes ces actions nous ont permis d’avoir un taux très élevé de 79% de participation au dépistage !
Selon vous, comment peut-on améliorer la prise en charge des patientes concernées par le cancer du sein ?
Pour une meilleure prise en charge, il faudrait au moins un centre référent du secteur privé par département. Cela rassurerait les femmes et faciliterait l’accès au dépistage personnel.
Les nouvelles technologies sont également un levier puissant. La mammographie par Tomosynthèse est par exemple un outil complémentaire intéressant. Elle génère une image du sein reconstituée en 3 dimensions et permet parfois de déceler des éléments qui auraient été difficilement visibles autrement. Nous avons été le premier centre de la région à nous équiper d’un appareil disposant de cette technologie.
« L’IA devrait être installée dans tous les cabinets ne comptant pas de sénologue afin d’épauler les radiologues lorsqu’ils ne peuvent pas avoir recours à une deuxième lecture. »
Par ailleurs, l’IA devrait être installée dans tous les cabinets ne comptant pas de sénologue afin d’épauler les radiologues lorsqu’ils ne peuvent pas avoir recours à une deuxième lecture. Cela renforcerait la fiabilité des examens et limiterait les erreurs de diagnostic.
Pour conclure, avez-vous un message important à faire passer pour Octobre Rose ?
Il est impératif que les femmes ne se limitent pas au dépistage organisé entre 50 et 74 ans pour faire des mammographies régulièrement ! Il ne couvre que cette fourchette car c’est statistiquement à ce moment de notre vie que l’on a le risque le plus élevé de développer un cancer du sein. Mais ce ne sont que des probabilités, et cela ne signifie en aucun cas que les femmes ne risquent rien en dehors de ces âges. Il faut commencer le dépistage personnel à partir de 40 ans et continuer au-delà de 74 ans !
« Il est impératif que les femmes ne se limitent pas au dépistage organisé […]. Il faut commencer le dépistage personnel à partir de 40 ans et continuer au-delà de 74 ans ! »
Si vous êtes à risque, suite à un cancer ou en raison d’antécédents familiaux, faites-vous dépister tous les ans, et non tous les deux ans. C’est un intervalle qui peut être trop important dans certains cas.
Mesdames, n’oubliez pas que le but du dépistage est de déceler les éventuelles anomalies le plus tôt possible, pour une prise en charge optimale et un traitement peu invasif. Alors ne vous cantonnez pas aux contrôles proposés entre 50 ans et 74 ans et faites du dépistage personnel !
– Interview de la Docteur Elisabeth Meyblum, Radiologue au Centre d’Imagerie Médicale de Châteaudun.